FEMMES
Je suis le ténébreux, le veuf, l'inconsolé
Le Prince d'Aquitaine à la tour abolie
Ma seule étoile est morte, et mon luth constellé
Porte le soleil noir de la mélancolie.
Gérard De Nerval
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Je suis la femme en rut, la bête, l'innassouvie
La Princesse des plaisirs aux fantasmes déchus
Mon innocence est morte, et ma fièvre assoupie
Porte le carré blanc de mes pensées de cul
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Je suis la libertine, la louve, l'inapaisée
La Princesse aux tabous sexuels abolis
Ma frustration est morte, et mon corps échauffé
Porte encore la sueur des assauts qu'il subit
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Je suis l'insatisfaite, la folle, la condamnée
La Princesse captive de ses élans hardis
Quand ma jouissance meurt, mon corps peu rassasié
S'éprend une nouvelle fois du désir qui revit
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Je suis la pornographe, la Muse, la nymphomane
La Princesse du X au séant pyromane
Ma dignité est morte, et mon corps constellé
De gouttes de sueur étouffe sous les cris.
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Alexandra
La nature est un mytère où mes rêves frustrés
Gardent la volupté de la virginité
Dans mes bras t'allonger mes désirs assouvir
Qu'en mon coeur serpentent les ondes du désir
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Je veux pour composer chastement son éloge
Coucher ma plume à l'ombre de son soutien-gorge
Alors, complices de mes fantasmes charnels
mes doigts crispés s'agitent autour de tes bretelles
Remonte la caresse, et va-t-en recueillir
Aux lèvres le baiser enfuit dans un soupir
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Marie-Sophie
La nature est un temple où de vivants pilliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.
(Baudelaire, « Correspondances »)
Je veux, pour composer chastement mes églogues,
Coucher près du ciel, comme les astrologues,
Et, voisin des clochers, écouter en rêvant,
Leurs hymnes solennels emportés par le vent.
Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde,
Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde;
Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité,
Et les grands ciels qui font rêver d'éternité.
(Baudelaire, « Paysage »)